Récemment, Bilo da Kid a collaboré avec LK Tha Goon afin d'offrir le vidéoclip Pull Up. Une rare collaboration qui a étonné toute la ville et qui cumule aujourd'hui plus de 525 000 visionnements sur YouTube. Un chiffre très impressionant pour une chanson québécoise de deux rappeurs anglophones. Sa particularité? Bilo est crip et LK est blood. Vous devinerez que cela n'arrive pas tous les jours. Bilo da Kid semble toutefois vouloir changer les traditions puisqu'il a lancé, encore une fois, une chanson avec un autre de ses «rivaux» blood, VokaB. On a rencontré les deux MCs afin de parler de l'impact d'un tel morceau.

« C'était une affaire que le monde voulait voir; LK et moi faire un track ensemble. C'est pour ça que la réception a été behond ce que je pensais que ça allait être. La vidéo est à 500 000 déjà. Pour des anglophones, c'est vraiment beaucoup. Les rappeurs francophones sont en plein essor, mais nous, il faut quasiment sortir du pays pour avoir un impact. So, qu'une track de ce style-là fonctionne au Québec, c'est : ‘’wow’’ », avoue d'emblée le rappeur qui a passé plus de 7 ans de sa vie en prison.

La chanson avec VokaB, Gang Signs, est une toute autre chose. Celui qu'on surnome aussi King Kapital B a lancé les mixtapes F*ckWhatTheySay en 2004 et en 2005 et l'impact a été important pour la scène. Grâce au volume 2 de ce projet, Welcome To GreenLand, un bon nombre de personnes appellent maintenant Rivières-des-Prairies, le quartier de VokaB, le GreenLand.

« Ce n'est pas juste l'importance d'un morceau bleu et rouge, ça concerne aussi les individus. Ceux qui donnent plus de poids et d'ampleur au message qu'on veut véhiculer », avance VokaB. « C'est vrai parce que l'influence doit être là aussi. On peut dire ce qu'on veut, mais quand il y a de la crédibilité, les gens sont réceptifs à ton message... Donc, l'impact n'est pas juste crip et blood sur le même morceau, c'est aussi Bilo da Kid et VokaB qui collaborent ensemble. C'est ce qui fait que c’est peut-être plus crédible », renchérit son collègue de St-Michel.

« La différence, par exemple, avec LK Tha Goon et VokaB, c'est que VokaB était là à l'époque où c'était vraiment chaud. LK était là, mais il est arrivé un petit peu après nous. Il a fait son affaire, je lui enlève rien. C'est mon petit frère, mais en terme de era, on va pas se mentir, Vokab est là depuis très longtemps », raconte Bilo da Kid. « LK est arrivé à l'époque où le hip-hop a vraiment envahi la rue. Il y avait jamais eu autant de gars de rue qui rappaient », explique VokaB.

Lorsqu'on demande à Bilo et VokaB si une chanson du genre aurait pu paraître à l'époque où c'était si chaud, les deux rappeurs éclatent de rire. « C'est des choses qui sont documentés. Il y a du monde qui sont mort, en prison ou qui ont même été déporté. Il y a eu des dommages collatéraux. On s'est pas reveillé du jour au lendemain en se disant : ‘’on va faire un morceau ensemble’’. On a vécu pour arriver à un certain moment de notre vie et réaliser que this is the right way to go now », reconnaît Bilo. « Moi, pis Vok, ce qui est bien, c'est que ça c'est fait de manière organique. Quand je suis sorti de prison, le PREMIER inbox que j'ai eu, c'est Vok. Il m'a dit : ‘’Welcome Home’’, pis m’a salute comme un king doit salute un king. Je n'ai eu le choix de respecter ça », concède le rappeur.

« Il y a du monde qui ne seront jamais d'accord parce qu'ils ont été touchés de plus proche. Ils ont de la haine et de la frustration, mais avec le temps, il y a des gens qui s'assagissent et voient les choses d'une autre manière. Dans la rue, les règlements ne changent pas, mais il y aura toujours une question de respect, pis les beefs, c'est comme ça que ça se règle », rappele VokaB.

Les deux rappeurs préparent d'ailleurs un vidéoclip pour la chanson. « On ne va pas faire ça uniquement à St-Michel ou à Rivières, la ville est grande, tout le monde doit se sentir impliqué. Il va y avoir des vrais aussi. Peut-être même que les autorités vont craindre ce mouvement-là. Pourquoi? Parce que des fois il y a des gens qui n'aiment pas quand des gens se mettent ensemble. », rappelle VokaB. « À la fin de la journée, it's peace and love. Personne ne doit nous craindre parce qu'on marche avec Dieu. », poursuit-il. « Ce qu'on fait c'est righteous. Si le black on black crime est un problème, pourquoi est-ce qu'ils sont aussi dérangés lorsqu'on se met ensemble? », demande son collègue.

Qu'est-ce que cela signifie être un rappeur crip ou blood? Bilo et Vokab ne savent pratiquement pas comment répondre à la question, parce qu'ils le font naturellement. « Pour moi, c'est la même chose que lorsque je dis que je suis fier d'être haïtien, québécois ou canadien. Je suis un blood. C'est ça que je suis et c'est ça que j'ai été. Ça veut pas dire que je suis nécessairement impliqué dans des activités criminelles, mais je viens de cet environnement-là. Je ne fais pas des trucs violents ou des choses que la population peut craindre. Je ne suis pas là pour ça », déclare VokaB.

« Quand tu entres en-dedans, tu continues à vivre comme ça, mais tu réalises que c'est le même struggle pour tout le monde, tu viens des mêmes places que tout le monde. Tu vieillis, tu commences à voir la vie d'une autre manière. Maintenant, je veux motiver les gens à faire de l'argent, à build up! Anyway, si tu regardes à la base, les gangs, ce n'était pas basé sur la violence, mais plutôt sur la protection de la communauté », enchaîne Bilo da Kid.

« Pis en prison, je me suis assis avec des gars qui ont parti ce mouvement-là. Qu'est-ce que tu penses qu'ils m'ont dit? ‘’Va dehors, prends un gun pis va faire de la marde’’?! Ben non! Ils me disent : ‘’va dehors, fais ta musique et représente-nous bien’’. Au contraire, s'ils entendent que je fais de quoi de fou ils vont m'appeller et me dire : ‘’chill’’! Dans le sens où, les gens ont une perception des gangs, mais ce n'est même pas ça. Oui, il y a ce qui vient avec, mais ce sont des gens qui élèvent des enfants, qui sont humains, qui saignent et qui sont malades comme tout le monde », conclut le rappeur.

Bref, si les règles de la rue ne changent pas, Bilo da Kid et VokaB parlent de leur vécu avec une maturité à toutes épreuves et ce qu'ils tentent de bâtir avec leur rap est visiblement loin d'être négatif.

Gang Signs est un extrait de la mixtape à paraître de Bilo da KID : I Put the Real in Real City.

Suivez Bilo da Kid et VokaB sur Instagram : @bilodakid514 et @vokab_514!

Photo prise par Samuel Daigle-Garneau dans les bureaux d'HHQc.com

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